Parce que… Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Nous voici au mois de décembre et, si vous avez suivi mes précédents articles, je devrais vous raconter mon troisième trimestre, celui d’une femme enceinte en fauteuil roulant.

SPOILER – Ça ne s’est pas passé comme prévu

J’aurais préféré que les choses se déroulent de la même façon que pour la majorité des femmes en France – la façon dite « normale » – ça aurait été plus facile.

Trop facile ?

Parce que visiblement la vie, incarnée par mon corps et par Bébé qui grandissait dans mon ventre, n’a pas eu l’air de vouloir m’accorder une fin de grossesse lambda. Ma fille a fait une arrivée fracassante dans le Monde, si ce n’est avec panache, au moins avec grand bruit. Et je ne parle pas des cris du nourrisson lorsqu’il naît. Mais reprenons du début, voulez-vous ? Enfin… Du début de la fin en tout cas !

Nous étions revenus de vacances depuis une quinzaine de jours, c’était le week-end et j’avais enfilé un pantalon dont la taille, élastique, se fermait avec deux petites lanières se terminant par des pompons. Je me souviens avec exactitude de ce moment où j’ai vu les-dits pompons sautiller aux coups de Bébé. Je le sentais alors de façon nette et fréquente et, loin d’en souffrir, je m’en amusais.

Le lundi, je remarquais au fil de la journée, une activité moins… énergique, bien que présente. La fatigue ? Le manque de place ? Un changement de position ? Tellement de raisons possibles à cela. Alors j’ai attendu. Mardi pas de regain. Mercredi non plus. Je la sentais toujours, mais moins fort, moins souvent. J’étais donc décidée à me rendre à l’hôpital le lendemain pour vérifier si mes inquiétudes étaient fondées ou non. Parce qu’inquiète, je le devenais sérieusement. Tellement que je n’en ai pas dormi de la nuit.

Surveillance et hésitations

Le jeudi matin à 9h, me voici donc aux urgences gynécologiques. Un monitoring indique un bébé bien vivant, avec des constantes plutôt moyennes, mais pas alarmantes non plus. Alors, dans le doute, et pour avoir des données comparatives, on me demande de revenir 48h plus tard, soit le samedi. Fort bien. Je ne suis ni rassurée, ni affolée, mais bien entre deux eaux. Encore.

Lorsque je quitte la maison le samedi, j’assure au Barbu qu’à tous les coups, je vais n’en avoir que pour une heure et que je rentrerai vite à la maison.

Si j’avais su…

Le nouveau monitoring est moins bon que l’avant-veille, mais n’indique toujours pas de raison de réellement s’inquiéter. Comme me le dira le médecin plus tard : « Votre bébé fait quelque chose, il se passe quelque chose, mais nous ne savons pas quoi. » En attendant, ma gynécologue préfère que je reste pour mettre Bébé sous surveillance. Voilà que je suis officiellement hospitalisée, le ventre sous capteurs.

Toute la nuit, les sessions de monitoring s’enchainent et se ressemblent : un coup c’est moyen bien, un coup c’est moyen bof. Une légère dégradation s’opère néanmoins. Je deviens un vrai point d’interrogation pour le corps médical : faut-il « faire sortir » Bébé ou non ?

Je ne suis qu’à 32 semaines de grossesse. Ce serait de la prématurité ni extrême, ni banale. Encore un entre-deux. Attendre 34 semaines ce serait mieux, plus sûr pour le développement de l’enfant. Mais en même temps…

La décision de ma vie (et de la sienne surtout !)

Au fil des monitoring, le délai avant de lancer une césarienne pour me faire donner naissance à ma fille se raccourci. De deux semaines, je passe à plusieurs jours, à un début de semaine, à peut-être demain.

Demain.

C’est le chirurgien qui décidera.

« 8h30 il arrive dans le service, 9h00 il prend connaissance des transmissions, 9h30 il aura pris une décision. »

11h00 j’attends toujours. Le Barbu m’a rejoint et je me suis déjà plus-ou-moins faite à l’idée que ce serait pour aujourd’hui. Plus-ou-moins…

11h30 le chirurgien entre dans ma chambre, suivi de trois autres professionnels de santé dans un premier temps, quatre anesthésistes en blouses vertes dans un second temps. Il m’explique les faits, ceux que je connais déjà, et m’explique qu’il a appelé l’hôpital de Tours pour avoir l’avis d’un médecin spécialisé dans les grossesses PMR. En tout, ils ont été quatre médecins à discuter de mon sort pendant que je listais dans ma tête, les avantages qu’il y aurait à ce que ma fille naisse en octobre plutôt qu’en décembre (on se rassure comme on peut). Après délibération, il a été admis qu’il était plus prudent de partir sur une césarienne d’urgence. Et par « urgence » il veut dire « dans une petite heure. » Ah.

Une petite heure.

Une PETITE heure.

UNE PETITE HEURE.

 

Une partie manquante

Allons-y pour la péridurale. Oups, non, impossible de piquer à cause de la spasticité. Bon. Donc anesthésie générale. Ma dernière pensée : « Je ne veux pas mourir. » Mes premiers mots lorsque j’ai ouvert les yeux : « Est-ce qu’elle va bien ? »

Le chirurgien m’a répondu qu’elle était entre de bonnes mains, pour ne pas me dire qu’elle allait mal, ce qui était le cas. Anémiée, son pronostic vital engagé, elle est transfusée puis transférée par hélicoptère dans une néonatologie de niveau 3. Alors que je n’ai pu apercevoir d’elle, qu’un morceau de joue entre les tuyaux, ces tuyaux qui la maintiennent en vie dans une couveuse.

Quatre jours. C’est le temps que j’ai dû attendre avant de la retrouver, de la rencontrer véritablement, enfin. Quatre jours d’angoisse, pendant lesquels les nouvelles sont heureusement allées de mieux en mieux. Mais pendant lesquels j’avais l’impression qu’une partie de moi manquait.

 

Aujourd’hui elle est à la maison, en pleine forme, et la tempête en mer a laissé place aux vagues sujettes aux marées, mais toujours navigables ! Un bébé comme il en existe tant d’autres, bien qu’unique à mes yeux. Robuste comme son papa, et déjà plein de détermination à vivre… comme sa maman !

 

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